L’extraordinaire almanach de la forêt, Collectif

L'extraordinaire almanach de la forêt

Bichonné. C’est le terme qui me vient en premier à l’esprit en passant la main sur la couverture et sur les pages pour la première fois. Aussi soigné qu’une boîte en buis façonnée par un artisan amoureux des matières et du travail bien fait. On devine le choix minutieux du papier, les longues heures de recherche, le soin apporté à l’harmonie des couleurs. C’est donc avec la joyeuse impression de se faire inviter à goûter par une bande de sorcières espiègles et chaleureuses qu’on entre dans le livre et le temps de la forêt.

Si on vous fait boire un philtre d’amour à votre insu, vous pouvez vous purger en avalant du suc de plantain, suivi d’un bon verre de bière. (59)

Ma tendresse pour ces consœurs naturalistes n’a pas pas endormi mon attention pointilleuse et un peu casse-cône, je l’avoue en toute honnêteté, mon souci de l’information juste. Moi aussi j’ai une bibliothèque fournie en grimoires Delachaux et Niestlé et en parchemins de François Couplan… ouvrages qui ne restent pas à dormir mais sont régulièrement mis à profit. Et je dois reconnaître que ma foi, ces sorcières sont très fortes en leur affaire. On sent le vécu pieds sur terre-grands yeux ouverts, la curiosité futée de terrain. Leurs chroniques se mêlent en un curieux mélange de suggestions audacieuses, de recettes un peu floues et de mises en garde prudentes. Évoquer, le 27 avril la mise au vinaigre de boutons de genêts frise le toxique (Il faut quand même savoir ce qu’on fait. Même moi, grande fille, ne m’y risquerai qu’avec réserve), tandis que plus loin les enfants sont invités à faire cuire les fruits sauvages avant de les manger, ce qui me semble excessif. Bon… ce sont des sorcières, elles affectionnent le sulfureux. Mais du coup ne biaisent pas avec la réalité. Les petits lecteurs sont invités à faire preuve de discrimination éclairée. Transmetteur de curiosité, ce grimoire donne des idées qu’il sera bon de fouiller et de compléter avant de les mettre en pratique.

Bon, aller, pour le plaisir de ramener ma science.

22 octobre : chères amies, cela doit faire un bail que vous n’avez pas picoré de prunelles sur les chemins. Acides, elles sont. Âpres et astringentes surtout. Mais amères… non vraiment, la prunelle n’est pas amère. Quant à attendre qu’elles blettissent après les premières gelées… je ne suis pas sûre que le terme soit juste. les fruits se racornissent plutôt, se dessèchent.

Pour en revenir au blettissement, ça fonctionne par contre très bien avec les cynorhodons. Quand ils sont mous sur leur branche, on peut les cueillir, les presser délicatement entre trois doigts pour en faire sortir la pulpe et se délecter de celle-ci – fruitée et bourrée de vitamine C – d’un coup de langue.

Page 20 : Mais qui dit conifère dit cône, bien sûr : c’est le nom donné aux fruits de ces arbres. Voilà une phrase à faire trépigner un scientifique distingué ! D’un point de vue botanique, les cônes ne sont pas des fruits, ce sont… des fleurs ! Les gymnospermes ne produisent pas de fruits.

Bon, j’arrête de chercher la petite bête (même si j’aurai encore des trucs à dire sur les tiques, le lichen, les chanterelles à tube, et cinq bonnes grosses erreurs de grammaire… c’est un projet qui donne l’envie furieuse de participer), votre album chantonne de vie et d’esprits malicieux, et même une vieille baroudeuse des causses et des bois comme moi y a trouvé matière à étonnement, interrogation, vérifications à faire et expérimentations à venir. Je vais de ce pas explorer les possibilités de la farine de tilleul, guetter l’aspérule odorante pour parfumer mes armoires et finir sur un petit yoga de la fougère !

[Lu dans le cadre de ces fabuleuses masses critiques]

 

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