Umberto Eco, Le nom de la rose, lu par François d’Aubigny

Umberto Eco, Le nom de la rose, lu par François d’Aubigny

Évidemment, il y a bien quelques petites descriptions interminables ici et là, un chouïa de digressions détaillées sur les mouvements hérétiques du XIXe, mais comme on peut les écouter d’une oreille sans perdre le fil de l’histoire, on arrive à survivre à ce roman épais.

Que signifie penser à un lecteur capable de surmonter l’écueil pénitentiel des dix premières pages ? Cela veut exactement dire : “Écrire cent pages dans le but de construire un lecteur adéquate pour celles qui suivront. (LXXXII 1:50)

Umberto Eco n’est pas innocent dans sa démarche, comme il l’explique interminablement dans son apostille. Tout, dans ce roman, est pensé, calculé, mis en place volontairement. En érudit truculent qui trouve sa jouissance dans les détails architecturaux, linguistiques ou culturels tirés d’antiques ouvrages médiévaux, poussiéreux et oubliés, il s’est offert une plongée vivante dans le monde qui l’habite.

Le foisonnement des élans mystiques, des vocations, des âpotresses, des dons de prophétie et des angelots en palette dépeint un monde en pleine effervescence, à la fois créatif et destructeur, où l’homme n’a que peu de marge pour exister. L’ambiance est sombre, dangereuse, pesante, loin du calme séraphique ou de la joie halléluiatique.

François d’Aubigny est excellent, comme à son habitude, Salvatore est interprété avec brio. J’ai sauté cependant l’interminable sermon de José à l’effet de réverbération pénible. La musique aurait pu être plus soignée. Au lieu de cette musiquette de polar très banale, j’aurai bien vu un bel air médiéval enlevé et sombre à la fois.

Dans son apostille, Umberto Eco entreprend de faire l’analyse de son propre roman et de le replacer dans l’histoire de la littérature – celle construite et reconnue par ses cercles universitaires et culturels. Cette dérive d’intellectuel qui ne peut résister à l’obsession délectable de la décortication et de la mise en valeur de ses propres écrits gâcherait presque l’arrière-goût laissé le texte.

 

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