Emma Straub, Les vacanciers

The Rijksmuseum, Amsterdam RP-P-2009-3876

Personne, chez les Post, n’était capable de regarder la réalité en face.

L’entrée en matière m’a laissée stupéfaite : manger un vautour ?!!? Vu le caractère corrosif de leur estomac et la très certaine dureté de leur chair, voilà une idée des plus scabreuses… c’est d’ailleurs bien dommage que le suite du livre n’ait pas elle-même hérité de l’acidité des sucs gastriques de ces éboueurs que j’adore par ailleurs voir passer au-dessus de chez moi.

J’ai passé quasiment tout le livre à me demander sur quel pied danser. Une couverture à la Hooper présageait de la froideur clinique et distante de l’auteur, mais les citations enthousiastes de critiques littéraires laissaient à penser que les personnages étaient attachants… Alors quoi ? On est face à une comédie familiale ou à un texte critiquant les mœurs américaines ? Il nous faut trouver le bon degré de lecture et l’auteur ne nous aide pas beaucoup !

J’ai pris le parti du second degré. Franny, Jim, Sylvia sont si superficiels, si puérils. Égarés dans leurs vies et leurs relations humaines. Sans profondeur aucune, navigant à la surface des choses, engoncés dans leurs carcans sociaux et culturels. Ils pourraient aussi bien être ailleurs. Majorque n’est qu’anecdotique. Leur seule obsessions semble être d’échapper à la névrose générale en remuant dans tous les sens, se soûlant ou piquant des crises.

Quelques remarques décalées, quelques formules surprenantes, des phrases qui ne se terminent pas comme on s’y attendrait, laissent sourdre un certain caractère littéraire. J’ai beaucoup de sympathie pour ce roman mais Emma Straub n’a décidément pas  pris de décision. Les situations ne sont pas assez cocasses pour exister par elle-mêmes. Les personnages, lestés de leur baluchon émotionnel manquent d’un éclat à la Barbary Lane pour sortir du rang. Il aurait fallu que ce soit franchement drôle ou carrément méchant, pour tenir la route.

Un mariage était un peu comme un navire : il fallait tenir la barre, et d’une main assurée. (285)

Face à la conclusion gnangnan et moraliste nantie de sentences d’almanach, un doute m’assaille : ce livre n’était donc pas d’une ironie féroce, à lire au second degré ?!! Peut-être faut-il être américain et s’y reconnaître pour en saisir l’esprit…

[Lu dans le cadre de ces fabuleuses masses critiques]

 

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