Nicole Lombard, Les affrontailles

Massif de l'Aigoual, col de la Pierre Plantée - Nicole Lombard, Les affrontailles

Massif de l’Aigoual, col de la Pierre Plantée

Notre chemin est ce qu’il est convenu d’appeler un chemin de terre. Il est, en réalité et suivant les humeurs du temps, à peu près tout sauf cela : chemin d’herbe, ou d’eau, de glace ou de neige.  (10)

Mais c’est que nous avons plein d’amis en commun ! Elizabeth Goudge, Jim Harrison, et même ce Faune sauvage de Lozère que j’ai également à la maison.

Éric Chevillard pourrait peut-être aussi en faire partie ? Ce dernier opus de la trilogie, qui avait commencé sur un mode narratif, s’oriente de plus en plus vers l’aphorisme, les pensées au calibrage travaillé, les sauts de pierre en pierre et les clins d’œils entre chroniques et citations.

Tous ces petits bonheurs qui tombent de votre vie comme les feuilles d’un arbre à l’automne… (91)

Dino Risi ne renierait pas non plus cet humour tendre qui devient féroce, ce regard plus grave, moins enchanté, cette tristesse de l’esprit humaniste devant la balourdise du monde. Nicole Lombard ragogne, gonfle ses plumes, hérisse le poil dans une ambiance de requiem. Du coup, j’ai lu le livre d’une traite. Avec grand plaisir, toujours, mais le cœur étreint par les journées froidureuses et l’hécatombe sans fin de chiens, de chats et de paonneaux.

Je penserai à vous dans la longue ligne droite de la Couvertoirade, où il est vrai, j’aime regarder le Causse plein de trous, de bosses et de cailloux. J’aurai même la tentation, quand parfois je vois la silhouette imposante d’un rapace parmi les herbes, de me faufiler chez les militaires, malgré les promesses de mort, pour tenter une photo.

Quel coup de théâtre ! nos vieux compagnons les corbeaux seraient en réalité des corneilles. Faut-il, pour notre longue ignorance, leur présenter des excuses ? (94)

Les corbeaux, les corneilles, une vieille histoire… une question de chaussettes, je crois, de front plus ou moins bombé et de bec épais.

Massif de l'Aigoual - Rosalie alpine

Massif de l’Aigoual – Rosalie alpine

Apprendre, bien modestement (deux ou trois par saison peut-être ?) le nom des fleurs, des plantes en général, des arbres, n’a rien à voir avec l’érudition, la science, encore moins le pédantisme. C’est une manière de courtoisie, une forme de savoir-vivre. Comme ne pas dire « le voisin d’en face », mais, par exemple, M.Empédocle ou M. Tchouang tseu… (77)

Il n’est pas facile, en ce pays d’ici, de se laisser aller à une contemplation qui serait, si j’ose dire, purement contemplative. Sauf au plein de l’été, et même, il est presque impossible de s’arrêter quelque part, au creux d’une clairière, au surplomb d’un rocher, pour s’absorber dans la méditation. Le froid, l’humide, le vent coulis, ont tôt fait de vous remettre debout, et en mouvement. Le lotus, me dit la montagne, n’est pas fleur qu’on acclimate ici. (97)

Partout désormais, où qu’on regarde, le confort immédiat passe avant la survie. On peut même parler de disparition de l’instinct de survie. Car il s’agit rarement, chez ces gens qui saccagent, d’une mauvaiseté intrinsèque. Plutôt de quelque chose de nouveau et étrange, comme un désespoir informulé. (146)

 

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