Marlen Haushofer, La porte dérobée

Marlen Haushofer, La porte dérobée

Les tumeurs à l’intérieur de son corps ne l’avaient pas vraiment détruite, elles n’avaient fait que dévorer le peu de chair qui pour elle avait été de toute façon secondaire. Et pourtant, sans ce peu de chair, il ne lui avait pas été possible de vivre plus longtemps. C’était bien ce détail qui l’avait, bien qu’un peu amusée, menée à sa perte. (140)

Il est assez difficile de faire face à la tristesse et à l’abîme d’où jaillissent les mots d’Annette. Son histoire est marquée par la désincarnation et l’absence à elle-même. Le monde social est d’autant plus menaçant qu’elle s’étiole en matière et développe une vie intérieure riche, mais désorientée. Le malaise que nous causent chaque jour les promiscuité de la vie… Ses phrases, confiées aux pages d’un journal, nous parviennent alors qu’elle les a brûlées ou jetées à la mer. Ce qui les rend d’autant plus fragiles, volatiles. A la fois reflets du caractère éphémère de notre esprit et reflets de notre possibilité de résurgence, pour peu qu’on ne s’identifie pas avec ses pensées et ses émotions. Marlen Haushofer dépeint avec justesse et finesse cet état d’impuissance. Sans aucun jugement, elle laisse vibrer et se déployer les troubles psychiques d’Annette comme un phénomène naturel, un nuage qui se forme, puis se résorbe.

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