Les décepteurs sont les acteurs les plus stimulants des contes : pleinement vivants, malmenés, couillons ou malins, intéressés et gourmands, ils mettent la vie en valeur dans ce qu’elle à de plus acide et de plus incertain. Ils nous rappellent d’où l’on vient, d’un temps sans feu, sans vêtements et sans nourriture. Ils nous remettent en face des yeux l’aspect chaotique et imprévisible de l’existence, où parfois les grosses bêtises sont créatrices et les arnaqueurs source de dynamisme. Dupeurs et dupés existent depuis la nuit des temps, savoir reconnaître les offres de Coyote mérite un apprentissage.
Coyote… la grande star du recueil ! Doté d’un courage désordonné, il ne sait jamais s’arrêter à temps. Il ne craint ni les anus, ni les pets, ni les vagins dentés, ni d’aspirer une soupe directement dans un intestin. Entre crudité et mythologie fondatrice, ce recueil de contes inspiré et compilé par des auteur habités par les cultures amérindiennes nous invite à redéfinir notre relation au temps présent.
Le décepteur ne parvient jamais à adopter totalement le comportement des humains, de même qu’il est incapable de prendre véritablement leur apparence. Il ne peut hériter du passé de l’espèce humaine, et n’espère aucun futur. Il est la personnification du temps présent. (14)
Howard Norman a parfaitement décrit cette relation originelle entre les êtres humains et leur environnement naturel : « Ces contes enseignent à leurs auditoires le caractère sacré de toute vie. Leur forme étant extrêmement simple, ils tournent le dos aux idées toutes faites, animent et représentent, organisent et réorganisent le monde. » (16)