La “spiritualité” dans le monde contemporain
— Reconnaître en soi sa propre aspiration à une “spiritualité” ne suffit pas. Pour que nous puissions nous rendre compte et ressentir qui nous sommes vraiment il est nécessaire de bien appréhender que d’une part nous allons devoir procéder à un déconditionnement actif de ce qui nous constitue, et que d’autre part il nous faudra trouver une source d’inspiration qui nous semble fiable et authentique. Celle-ci devra nous emmener vers une conscience d’être plus ouverte et réceptive, capable de nous faire vivre un présent en prise direct avec le Grand-Mystère de la Vie !
Le challenge est d’envergure et osé ! Les écueils innombrables.
Jack Kornfield nous dit dans « Après l’extase, la lessive » pages 77/78 :
… « Les pensées et les convictions sont puissantes, nous manifestons sans cesse leurs énergies. Ces schémas de pensées associés aux tensions du corps et du cœur produisent une notion limité de nous-même. Cette trame est parfois appelée le “corps de peur”. Quand nous vivons dans ce corps de peur, notre vie est faite uniquement d’habitudes et de réactions. » …
Nous pouvons prendre conscience de l’immensité de la tâche quand nous savons que ce que nous accomplissons tout au long d’une journée et d’une nuit se passe à quatre-vingt dix pour-cent au niveau de la non-conscience dans le cerveau humain.
Dans le documentaire scientifique « Le cerveau humain et ses automatismes » (Film de Francesca D’Amicis, Peter Höfer, Freddie Röckenhaus, décembre 2011), il est démontré à quel point ce “non-conscient” nous oriente en permanence, et combien notre “conscient” a une part minimale dans notre quotidien. La plupart du temps, notre cerveau se contente d’une estimation approximative pour bien fonctionner.
Alors qu’en est-il ?
Pour accéder à l’information, notre cerveau, confiné dans sa boîte crânienne, a l’obligation de passer par les organes sensoriels, la mémoire, et la “connaissance” (dans le sens de ce qui est “connu”). À partir de ces matériaux, se construit une simulation représentative de ce qui nous entoure en tant qu’individualité corporelle. Ce n’est pas que le “monde extérieur” n’existe pas, il a bien sa propre réalité, mais en fait nous ne l’avons jamais vraiment, ni habité, ni même réellement visité ! Car en fin de compte le seul endroit où nous vivons réellement, c’est à l’intérieur de nous-même, et principalement dans notre boîte crânienne.
Nous devons bien nous rendre compte que notre pouvoir de décision conscient se limite le plus souvent aux sujets auxquels nous avons décidé de nous consacrer, pour le reste c’est le non-conscient qui prend en charge, et fait le tri dans la foule des perceptions.
Le cerveau non-conscient exécute le routinier sans solliciter la conscience qui ne se met en mouvement que pour les choses “importantes” ou inédites.
Sans vraiment nous en rendre compte, nous occultons des pans entiers du “monde extérieur” pour pouvoir nous concentrer sur un objet ou un tâche spécifique.
Le cerveau humain peut traiter jusqu’à deux cent mille données de plus que notre conscient !
La conscience humaine se limite au cortex cérébral. Jusqu’à quinze milliards de neurones du cortex peuvent former de nouvelles connections. Ce qu’il faut savoir, c’est que cela consomme une énergie considérable, supérieure à un effort de sportif de très haut niveau ; si bien que notre cerveau essaye toujours et en permanence de se défausser et de s’en sortir à moindre dépense énergétique sans le recours de la conscience du cortex cérébral humain.
Presque toute notre vie mentale est un mélange de processus conscients et inconscients qui se consolident mutuellement, en particulier lorsque la motivation rentre en jeu. Seule la conscience épuise véritablement notre énergie.
Nous vivons en permanence un décalage avec notre conscient sur les événements qui de fait se sont déjà produits dans le temps. Nous vivons sur le mode du “passé” des choses. Nous avons l’impression de vivre dans l’instant mais en définitive notre conscient est toujours en retard sur les événements. Nous ne percevons pas ce décalage car le conscient est dans une attitude de déni du non-conscient, il n’a pas la clé de communication, ou plus vraisemblablement il en a perdu l’usage au fil de son évolution*.
La mémoire (nous allons y revenir plus profondément plus loin) est l’organe sensoriel le plus important. Nous “voyons” à 99% ce qui est déjà imprimé dans notre mémoire, seul 1% vient s’ajouter par l’organe des sens, la vision en particulier.
Le cerveau a la capacité de falsifier l’information, de la modifier afin que son contenu corresponde à ce que lui croit et voit dans le non-conscient. Ce cerveau occulte tout ce qu’il considère comme peu important ou qui est déjà du domaine du “connu”.
Notre cerveau décide de ce qui doit lui être révélé ou non sans l’intervention de la conscience !
Notre non-conscient est le responsable du temps présent, alors que notre conscient est capable de voyager dans le temps, de se perdre dans le passé ou de se projeter dans un devenir hypothétique. Mais au bout du compte, qui garde vraiment “la maison” pendant ce temps-là ? Le non-conscient est le gardien du présent, et ce présent est éminemment à hauts-risques et recèle souvent de terribles dangers au quotidien.
Nous avons grand tort d’avoir totalement et “aveuglément” confiance dans les perceptions de notre corps et son ressenti.
Nous pouvons ainsi être abusés jusqu’à avoir l’impression que notre conscience est sortie de notre corps, ce qui n’est ni plus ni moins qu’une construction mentale représentative où l’illusion peut facilement se glisser.
Il est à noter que 90% de notre communication émotionnelle est non-verbale.
Avons-nous alors une issue à travers l’imbroglio de ce qui nous “habite”, (voire même ce qui nous “hante” !) ?
Oui bien sûr, puisque qu’il est en notre capacité, (pour peu que nous y consacrions le temps et que nous y mettions les moyens) d’avoir prise sur nos états de comportements par une attention constante, une observation orientée vers “ici, là où nous sommes”.
Partant d’un point de départ qui stipule que tout être, toute forme, sont constitués de particules corpusculaires quantiques et en même temps présentent les caractéristiques d’une “onde” engendrant une puissance “agissante” qui d’une manière ou d’une autre tend à “s’exprimer”, nous pouvons développer plus avant.
Percevoir ce qui se trouve au-delà de nos préoccupations quotidiennes et sortir de notre rôle habituel ainsi que de nos journées affairées vécues en “pilotage automatique”, voilà quel est l’enjeu.
Dans cette perspective, nous allons devoir mettre en œuvre une véritable stratégie, déconditionner notre être organisé de manière à survivre dans son environnement, afin de tenter de percer ce qui se trouve derrière, ce que nous sommes vraiment. Si la chose est possible, si des personnes (rares certes) ont tenté l’aventure (car c’est vraiment une grande aventure humaine que de partir à la quête de sa propre “réalité”), il n’en demeure pas moins que l’entreprisse comporte bien des risques de tous ordres, et que l’issue n’est jamais vraiment certaine, que jusqu’à un certain degré des “cimes” et au-delà, la chute est toujours une réalité. Elle est d’autant plus vertigineuse que l’i-réalisation est avancée en maturation, les “gardes-fou” du conditionnement sociétal n’existant plus vraiment, ou plus beaucoup !
Nous partons à la conquête de l’éveil sur la base de notre propre autorité spirituelle et notre savoir intérieur, en activant une confiance capable de nous soutenir face aux difficultés, voire face à la mort toujours omniprésente. À travers ce déplacement d’identité, nous pouvons dépasser la petite idée que nous avons de nous-même et nous défaire de ce que l’on appelle “le corps de peur” . Nous tentons de nous éveiller à une sagesse, un amour et à une absence de peur impérissable au centre desquels se trouvent la “rédemption” (du Latin redemptio, “rachat”) des souffrances, humaines et du monde sensible.
Cette “rédemption” est entendue sans connotation aucune de culpabilisation ou de honte, elle est désignée ici comme une simple prise de conscience d’une “perspective inadéquate” entre ce qui est de l’ordre fonctionnel de la survie, et le “sur-rajout” d’une notion d’identité exagérée voire exacerbée ou/et pervertie. C’est en fait “une mise au clair”, un “balayage de scories” de ce qui ne va pas, n’est pas pertinent. C’est essentiellement une immense vague compassionnelle équanime, sans attachement, sans exclusion, et pragmatique.
Le non-conscient, fruit d’une évolution laborieuse, est la condition sine qua non de notre capacité à assurer la vie de notre structure manifestée au quotidien. Les dernières étapes de cette évolution dans le développement du cortex cérébral sont devenues très complexes et sophistiquées, et donc dans le même temps plus vulnérables et délicates. L’humain, dans la nécessité où il est d’assurer sa survie au quotidien et la perpétuation de son espèce, se base sur la notion spatiale d’un passé mémoriel d’expériences et d’un devenir. Cette notion des trois temps (passé, présent, avenir), même si elle reste une réalité tangible, n’a pas de réalité au niveau de la pure conscience.
L’être humain d’aujourd’hui a-t-il en encore vraiment quelque chose à voir avec celui qu’il était il y a trente ou quarante mille ans ? Oui, sur le fond c’est le même humain que présentement, mais il ne l’est plus vraiment quant à sa situation en tant qu’espèce sur Terre dans le spatio-temporel géographique.
Dès l’aube de cette humanité, la “spiritualité” l’a cependant habité à travers la conscience qu’il avait de lui-même et sa représentation dans l’espace manifesté.
Cette conscience humaine du Paléolithique supérieur liée à l’art pariétal était très probablement plus fluide et plus perméable que la nôtre, comme le soutien Jean Clottes. Les “idéaux” qui propulsaient ces humains vers le dépassement d’eux-mêmes, étaient certainement d’un autre ordre, leur environnement étant à ce point imposant que pour ne pas être complètement submergés et engloutis ils devaient trouver en eux des élans assignés par leur vulnérabilité manifeste au regard de la rudesse et du gigantisme qui les entouraient.
Les idéaux sont là pour nous amener à dépasser nos limites de perceptions étriquées, routinières et en devenir, à tendre vers « l’Être humain » vrai dans sa supra-conscience. Ce sont des outils inspirants mais non des réalités en eux-mêmes, l’objectif étant d’atteindre “une vision claire” à la fois précise et porteuse de perspectives à multiples facettes.
Lors de l’élaboration d’une existence à la fois plus pastorale et plus agraire, les équilibres ont été complètement bouleversés, et l’humanité a engagé une réelle mutation radicale.
Par le seul fait des changements induits dans sa physiologie essentiellement par son changement nutritionnel et les modifications de son habitat, l’humain, tout en restant le même, devint très différent dans son approche et son rapport à la Vie et à sa vie.
Ce fut une re-évolution totale, hormis pour les peuples qui restèrent, pour des raisons géographiques, dans des rythmes de vies ancestrales de type “bushman”. Nous y reviendrons ultérieurement dans d’autres articles.
Nous avons déjà observé dans un précédent article développant les connaissances scientifiques actuelles sur le cerveau, que la mémoire (individuelle ou collective) est le siège de l’identification, de la capacité à nous interpréter dans ce qui fait que nous sommes ce que nous sommes là où nous sommes.
Jack Kornfield nous dit :
« Chaque identification rend compte d’une circonstance particulière et d’une structure sociale, mais à un niveau plus profond, elle est en même temps provisoire et illusoire. Parfois, les références tribales et ethniques sont utilisées de façon saine : pour honorer notre culture, pour éveiller la dignité et le respect, pour apprécier notre lien profond avec nos semblables.
Mais ces mêmes distinctions peuvent servir des propos raciste et discriminatoires, créant d’énormes souffrances. Les identifications ethniques, religieuses et tribales sont exploitées de manière récurrente pour des raisons de pouvoir (de renommée, d’enrichissement) et de “sécurité” (intérieure), pour séparer “eux” et “nous”. Les manipulateurs utilisent cette identification pour attiser la haine (et le rejet) puissante de “l’autre” (celui/celle qui a un mode d’être autre, afin d’étendre leur emprise, “posséder” les personnes). »
(p. 113 “Bouddha mode d’emploi – Le cœur sage”)
Nous nous rendons finalement bien compte de l’ambiguïté de cette identification** ; à la fois nécessaire pour un apprentissage de la vie (sociétale et personnelle) préservant une cohérence d’être, et sécrétant en même temps un poison violent en justifiant l’injustifiable dans la notion de “séparation” avec « autre » alors que nous ne sommes et ne devrions nous percevoir que comme une originalité dans la manifestation, une différenciation comportementale.
Tout le dilemme s’articule dans la capacité à jongler avec ce qui est de l’un et ce qui est à proscrire de l’autre. Mais bien évidemment le continuum de la conscience-base du collectif (l’alaya en skt. bouddhique) véhicule et imprègne toute personne. Elle devra s’en “libérer” si elle veut prétendre connaître les premières strates de la “liberté intérieure”.
Entreprise bien sûr à hauts risques divers, pour la personne elle-même et son entourage immédiat. Tout l’art du pratiquant(e) usant d’une méthodologie traditionnelle qui a déjà fait ses preuves à travers les âges dans une continuité de savoir faire ininterrompue, résidera donc dans son habileté et sa persévérance, sa capacité à trouver un juste équilibre pour dégager de sa gangue son évanescence spirituelle du “corps de peur”.
Et ce travail va être ardu, car il implique tout bonnement les structures même de notre existence présente.
Jack Kornfield cite William Blake
… « Ceux qui franchissent “la porte du ciel” ne sont pas des être dénués de passions ou les ayant réprimées, mais des individus ayant cultivé une compréhension de ces passions. »
Au lieu de condamner tous les désirs, nous les abordons avec sagesse et sensibilité. Nous voyons alors le monde comme un jeu de désirs et la différence entre ceux qui sont sensés et insensés devient évidente. Certains désirs sont causes de souffrances mais d’autres comme les besoins naturels d’amour familial, de nourriture et de refuge, sont salutaires.
…
Ces énergies ne sont plus des “péchés mortels” à craindre ; elles sont transformées en remède pour l’éveil. Nous sommes capables de rester dans le monde sans être emportés par lui, d’utiliser les énergies de la vie pour enseigner et éveiller partout où nous allons. »…
« Après l’extase, la lessive », p. 254
Et de Karl Gustav Jung ;
« L’instinct érotique est quelque chose de problématique et le sera toujours, quoi que puissent dire les lois sur ce sujet. D’un côté, il appartient à la nature animale originelle de l’homme et existera aussi longtemps que l’homme aura un corps animal. D’un autre côté, il est relié aux plus hautes formes de spiritualité. Mais il fleurit seulement quand l’esprit et l’instinct sont dans une véritable harmonie. Si l’un ou l’autre aspect fait défaut, il y a alors une blessure, un manque d’équilibre d’un côté, qui peut facilement dériver vers une pathologie. Un excès d’animalité défigure l’être humain, un excès de culture en fait un animal malade. »
Les formes de spiritualité les plus rigides condamne tout simplement la sexualité. Le bon sens nous montre que c’est le mauvais usage de la sexualité qui est décrit comme cause de souffrance.
… la peur de nuire en causant de la souffrance par une sexualité incorrecte, peut finir facilement par se transformer en une peur du corps et de la sexualité en général. Alors que en fait plus un être vit dans l’éveil, plus la grandeur de cette sexualité devient importante, par la présence encore plus aiguë à son corps, plus éveillé, plus vivant… »
« Après l’extase, la lessive », p. 274
Dans, « L’homme à la recherche de son humanité », Marcel Légaut, (page 212, Extraits – c. 1971), nous dit également :
… « L’homme est fondamentalement solitaire. Enfoui dans une unicité qui lui reste inconnue et qui le met à part même lorsqu’il s’approche d’autrui, il s’ignore, nul ne le connaît. Rien de ce qu’il manifeste n’exprime complètement ce qu’il est ; rien ne laisse prévoir ce qu’il pourrait devenir. Au contraire, les limitations de tous ordres que trahis son comportement le défigurent à ses yeux et aux autres et à ceux des autres. Il est enclos dans son mystère où sommeille encore sa vraie valeur. Une distance infranchissable le sépare de ses plus proches et même de lui-même.
Cependant, il ne doit pas être un isolé. L’homme replié sur lui-même, sans communication avec ses semblables, ne peut pas progresser vers son humanité. Abandonné à ses impressions et ses pensées, sans contact avec le réel, il est à la merci d’une imagination et d’une logique qui se développe suivant leurs pentes propres et qui ne lui apportent que des évidences fallacieuses pour le moins ambiguës.
Comment, à l’aide de ses seules lumières, pourrait-il “critiquer” avec une lucidité et une vigueur suffisantes ce dont la société le convainc et ce que l’hérédité lui impose à son insu ? Comment pourrait-il par ses seules forces se dégager de ces étreintes inconnues qui l’entraînent à dénaturer inconsciemment ses plus hautes aspirations ou même à les combattre ? D’autre part, le meilleur de lui même a besoin pour prendre consistance, pour se développer au-delà de l’horizon qui à chaque étape limite une vie individuelle, de découvrir par le dedans d’autres histoires humaines. Pour ne pas être la proie des déterminismes intellectuels et affectifs, pour ne pas rester l’image de son milieu et le produit de son espèce, pour devenir lui-même au-delà de ce qu’il peut concevoir et vouloir, il lui faut de toute nécessité, des présences qui, sans violer sa solitude, la peuplent et sans le distraire de lui-même, lui donne l’occasion d’entendre l’appel de son être.
La rencontre de deux êtres, qui rompt leur isolement spirituel, exige d’eux des conditions intimes convenables (ou compatibles) »…
Et nous poursuivons comme en écho avec Jiddhu Krishnamurti :
« Il y a en nous un vide, un sentiment de vacuité qui tend toujours vers l’expression personnelle et le plaisir, et qui suscite la peur de ne pas pouvoir les assouvir complètement, d’où une résistance, une agressivité. Nous nous efforçons de combler ce vide intérieur, cette vacuité, ce sentiment d’isolement total et de solitude – que vous avez déjà éprouvé, j’en suis sûr – par les livres, le savoir, les relations, et toutes formes d’artifices ; mais, au bout du compte, il y a toujours ce vide impossible à remplir.
Nous nous tournons alors vers l’ultime recours – “Dieu”.
Tant qu’existe cette vacuité, ce sentiment d’un vide insondable, la beauté, l’amour sont-ils possibles ? Si l’on a conscience de ce vide, et qu’on n’arrive pas à lui échapper, que faire alors ? Pour le combler, on a tout essayé – les dieux, le savoir, l’expérience, la musique, les tableaux, et toutes sortes de moyens technologiques d’information ; et cela nous occupe du matin au soir.
Lorsqu’on réalise que personne ne peut combler ce vide, on voit l’importance du problème. Si vous cherchez à le combler grâce à ce qu’on appelle une relation avec une autre personne, ou avec une image, il s’ensuit une dépendance, la peur de perdre, puis une possessivité agressive et de la jalousie, avec toutes leurs conséquences. Alors, se demande-t-on, ce vide pourra-t-il jamais être comblé par quoi que ce soit ? Par une activité sociale, de bonnes œuvres, la vie monastique, la méditation, les pratiques visant à affiner notre conscience ?
Quelle absurdité ! S’il est impossible de le combler, que faire alors ? Comprenez-vous l’importance de cette question ? Malgré nos efforts, rien ne réussit à combler ce vide : ni ce qu’on appelle le plaisir, ni l’expression personnelle, ni la recherche de la vérité, ni “Dieu” ; pas plus que l’image que l’on se fait de soi-même, celle qu’on s’est créée du monde, nos idéologies – rien n’y fait. On s’est donc servi de la beauté, de l’amour et du plaisir pour masquer ce vide ; mais si l’on cesse de vouloir lui échapper, et qu’on demeure avec lui, que va-t-il nous arriver ?
Qu’est-ce donc que cette solitude, ce sentiment d’un immense vide intérieur ? Qu’est-il, et pourquoi se manifeste-t-il ? Serait-ce parce que nous voulons le fuir, nous en évader, qu’il existe ? Serait-ce parce qu’il nous fait peur ? N’est-ce en fait qu’une notion abstraite du vide, auquel cas l’esprit n’est jamais en contact, jamais en relation directe avec ce qui est réellement ?
Je découvre cette vacuité en moi et je cesse de fuir, car c’est un acte tellement puéril. J’ai conscience de ce vide, il est là, et rien ne peut le remplir. Et je me demande : comment est-il né ? Toute mon existence, toutes mes activités quotidiennes, toutes mes théories, etc. – tout cela en serait-il la cause ? Serait-ce que l’ego, le « moi » – peu importe le terme – ne cesse de s’isoler dans toutes ses activités ? Le « moi », l’ego, de par sa nature même, nous isole, nous divise.
Toutes ces activités ont créé en moi cet état d’isolement, de vacuité profonde – ce vide est donc un résultat, une conséquence, et non un état naturel. Je vois que tant que mon activité restera axée sur l’ego et l’expression de l’ego, ce vide sera inévitable ; je vois aussi que, pour le combler, je fais des efforts de toute sorte, ce qui est, là encore, d’ordre égocentrique – et le vide se fait de plus en plus vaste, de plus en plus profond.
Est-il possible de transcender cet état ? Pas en voulant s’en évader, ni en disant : « Je ne serai plus égoïste. » Dire cela, c’est déjà être dans l’égoïté. Lorsqu’on mobilise sa volonté pour contrer l’activité de l’ego, cette volonté même est facteur d’isolement.
Siècle après siècle, l’esprit a été conditionné à exiger une sécurité, à vouloir être rassuré ; il s’est forgé, physiologiquement et psychologiquement, un mode d’activité égocentrique et narcissique ; et cette activité envahit la vie quotidienne – c’est ma maison, mon travail, mon bien ; voilà l’origine de ce vide, de cet isolement. Comment cette activité peut-elle prendre fin ? Est-ce envisageable, ou ne faudrait-il pas plutôt ignorer cette activité, et insuffler à l’esprit une qualité d’une tout autre nature ?
Donc, ce vide, je le vois, je vois comment il est né, je me rends compte que la volonté ou toute autre activité tendant à faire disparaître le facteur responsable de cette vacuité n’est qu’une autre forme d’activité égocentrique. Je vois tout cela très lucidement, très objectivement, et je réalise soudain que je ne peux rien y faire. Auparavant, j’essayais d’agir, en fuyant ce vide ou en tentant de le combler, de le comprendre, de l’examiner, toutes choses qui ne sont que d’autres formes d’isolement.
Mais je réalise soudain qu’il n’y a rien à faire, que plus j’agis, plus je dresse un mur d’isolement. L’esprit lui-même réalise qu’il ne peut rien faire, que la pensée est impuissante, car toucher à cette vacuité, c’est l’engendrer de nouveau. Ainsi, en observant avec le maximum de soin et d’objectivité, je perçois tout ce processus, et cette perception fine et aiguë suffit en soi. Voyez ce qui s’est produit : je gaspillais auparavant beaucoup d’énergie à m’agiter en tout sens, mais à présent j’en vois l’absurdité – l’esprit saisit très clairement à quel point c’est absurde.
Donc, je ne gaspille plus aucune énergie. La pensée se calme, se tait, l’esprit devient tout à fait immobile : tout étant décrypté, le silence s’installe. Dans ce silence, il n’est point de solitude. Avec ce silence, ce silence total de l’esprit, viennent la beauté et l’amour – qui peuvent s’exprimer, ou s’abstenir de toute expression.
(…)
Il y a donc la félicité – qui se situe bien au-delà du plaisir ; il y a la beauté, qui n’est pas l’expression d’un esprit habile, mais qui est la beauté propre à l’esprit qui est parfaitement silencieux. Il pleut, on entend tambouriner les gouttes d’eau. Vous pouvez écouter avec l’oreille, ou bien à partir de cet immense silence qui s’est fait en vous. Si vous écoutez la pluie à partir de ce silence total de votre esprit, la beauté en est telle qu’aucun mot, aucune toile, ne saurait l’exprimer, car cette beauté transcende toute forme d’expression.
L’amour, c’est évidemment la félicité suprême, qui n’est pas de l’ordre du plaisir.
« Au seuil du Silence », pages 141/144
Nous avons également d’autres expressions de ce silence-vacuitaire dans les traditions Amérindiennes :
« Les premiers Amérindiens tempéraient leur fierté d’une singulière humilité. L’arrogance spirituelle était étrangère à leur nature et à leur enseignement. Il n’ont jamais prétendu que le pouvoir de la parole articulée était une preuve de supériorité sur la création muette ; la parole était pour eux un cadeau empoisonné. Ils croient profondément au silence — signe d’une harmonie parfaite. Le Silence est l’équilibre absolu du corps, de l’Esprit et de l’Âme. L’être humain qui préserve l’unité de son être reste calme et inébranlable devant les tourments de l’existence — pas une feuille ne bouge sur l’arbre ; aucune ride à la surface de l’étang qui brille — telle est, pour le sage illettré, l’attitude idéale pour la conduite de la vie.
Si vous lui demandez : « Qu’est-ce que le silence ? » Il répondra : « C’est le Grand Mystère ! Le Silence Sacré est la voix ! » Si vous lui demandez : « Quel sont les fruits du silence ? » Il dira : « La maîtrise de soi, le vrai courage ou la persévérance, la patience, la dignité et le respect. Le Silence est la pierre angulaire du caractère ».
Ohiyesa, Tribu Santee-Dakota, XXe siècle
Et paradoxe apparent, ce Grand-Silence est l’expression d’une grande présence, car il contient tous les sons, exprimés ou “inaudibles” à l’oreille. C’est le domaine où se rejoignent l’ondulatoire et le corpusculaire, et où nous accédons à une intelligible résonance avec notre intériorité.
* Les diverses techniques “spirituelles” élaborées au cours des âges avaient et ont encore pour certaines cette fonction de préservation ou de re-connection des équilibres communicants entre le cortex cérébral lié à la conscience et le cerveau fonctionnel archaïque abritant le non-conscient, siège de notre adaptation et de notre survie au quotidien.
** Dans les stades avancés de cette distorsion, nous pouvons peut-être parler de phénomène d’intoxication, et entreprendre une véritable cure de désintoxication.
COSMOS et Sciences
( physicien Brian Greene, « Magie du Cosmos » et « Théorie des Cordes » )
I
Une relative illusion, la perception que nous avons du temps.
L’espace et le temps peuvent se déformer et se courber, c’est la gravité.
En outre, les trois dimensions qui constituent notre jeu de perceptions familier en recèlent d’autres non perceptibles pour l’humain, car plus petites au niveau du rapport de taille de nos perceptions habituelles.
Selon A. Einstein, « l’Espace-Temps » dépourvu de matière est unidimensionnel, plat et lisse.
Il se pourrait fort bien que l’univers et notre perception en trois dimension ne soient qu’un mirage !
Pourtant très familier, le « temps qui passe » gouverne notre vie. Mais ce temps n’est peut-être pas ce qu’il paraît. La distinction entre les trois temps « passé-présent-futur », existe-t-elle dans l’absolu ?
Le temps semble s’écouler d’un moment à un autre, et le flux du temps semble toujours aller dans la même direction, vers un futur. Il est possible que cela ne soit pas une réalité. Le passé n’a pas forcément disparu, quant au futur il est sans doute déjà là, dans un « présent ». Ce temps peut subir des accélérations et des ralentissements.
Le temps se défini comme non saisissable en tant qu’objet. Le temps n’a pas un sens de déroulement, le temps nous semble un mystère fuyant.
La répétition de cycles forme une horloge, et l’expérimentation du flux du temps est un des fondements de notre vie. Le temps de l’endroit où nous nous trouvons n’est pas forcément le même que celui d’un autre endroit, ce qui relativise la réalité du temps lors du mouvement produit par un déplacement dans l’espace.
En outre, la perception du temps varie d’une personne à une autre ; le temps est aussi une expérience d’un être particulier, avec le rythme qui lui est propre.
Il y a donc « des temps » et non pas « un temps universel ». Chacun est l’écoulement d’un temps en mouvement dans l’espace, dans une une direction donnée.
Se déplacer dans le temps, n’est pas forcément se déplacer dans l’espace. Sans déplacement dans l’espace, tout le mouvement se produit dans le temps.
La perception du temps peut ralentir en fonction d’un déplacement et le mouvement dans l’espace affecte l’écoulement du temps ; le mouvement ralentit l’écoulement du temps. Le temps lui-même s’écoule plus lentement pour l’être en mouvement. L’espace et le temps ne sont pas des éléments distincts.
Le temps qui se déroule est une succession d’instantanés, de « tranches de maintenant » dans l’Espace-Temps d’un univers donné . L’orientation de ces « tranches » est le fait de chaque être selon son mouvement dans l’Espace-Temps. Elle produit un « angle de coupe » qui est particulier à chacun.
Ainsi, d’un être à un autre, aucune de ces « tranches » n’est parallèle à une autre, elles s’entrecoupent en un point ou en un autre.
La perception d’un changement dans l’Espace-Temps se fait uniquement du point de vue d’un « maintenant » appréhendé subjectivement.
Toutes les potentialités sont déjà existantes par elles-mêmes. C’est notre cerveau qui perçoit un déroulement du temps, il est le projecteur d’une « bande filmée » qui contient déjà l’entièreté des informations du « film ».
Gravité et mouvements modifient l’Espace-Temps. La gravité ralentit le « passage du temps ». Plus l’attraction gravitationnelle est forte, plus le temps ralentit, et inversement. Le temps a pour le moment une dimension unidirectionnelle dont le sens nous échappe, un devenir contenant ce qui n’est pas encore arrivé.
La tendance générale de l’univers constitué va de l’ordre vers le « désordre », d’une organisation cohérente vers l’incohérence, soit l’entropie.
C’est assez simple. S’il n’y a qu’unicité dans l’ordonnance, il y a multiplicité pour le désordre. Ainsi l’entropie augmente au « fil du temps ».
II
L’espace et son mystère
La réalité de l’espace est expérimentée dans le mouvement.
L’espace et le temps sont liés dans une réalité relative, s’ajustant l’un dans l’autre avec flexibilité, fusionnant : l’Espace-Temps.
Cet Espace-Temps nous renvoie à notre ressenti illusoire de personne humaine. La gravitation est la déformation de l’Espace-Temps occasionnée par les objets qui s’y trouvent. Cette gravitation est la forme même de l’espace-Temps.
L’Espace-temps est une dynamique.
La mécanique quantique :
La mécanique quantique et les champs magnétiques fluctuants donnent le « chaos bouillonnant ».
Le vide de l’espace présente une telle activité qu’il oblige les éléments à se déplacer.
Le « boson de Higgs » et son Océan…
L’espace est une espèce d’océan dans lequel sont immergées des particules qui acquièrent leur masse en se déplaçant à travers lui.
Le champs de Higgs donne « la masse ». L’énergie noire est l’énergie même de l’espace vide qui provoque l’expansion de l’univers.
L’hologramme et l’illusion :
Notre réalité familière tridimensionnelle pourrait être une projection d’informations stockées sur une fine surface bidimensionnelle très éloignée et lointaine.
La réalité est bidimensionnelle (« trous noirs »). Le monde tridimensionnel est une « image » de l’hologramme situé à la frontière de l’espace. L’idée est que nous pouvons savoir ce qui se passe à l’intérieur en nous référant simplement à ce qui se passe à l’extérieur, aux informations qui sont « codées ».
Ainsi, cet « encodage informatique » peut reproduire ce qui s’est désintégré par ailleurs à l’intérieur du champ gravitationnel du/des « trous-noirs ».
Ce qui revient à dire que toute manifestation tangible n’est qu’une projection stockée sur la lointaine surface bidimensionnelle qui l’entoure. Autrement dit, ce que nous prenons pour la réalité n’est qu’une projection holographique objective !
La réalité est le stockage d’encodage bidimensionnel à la surface de notre univers.
III
« L’énergie-noire » et la « matière-noire »
Seul 5% de la structure de notre univers est connu, c’est le domaine des atomes.
La « matière-noire » est dotée d’une existence parallèle à « notre monde », et est une composante de la structure cohérente de notre univers connu. Cette « matière-noire » n’émet aucune lumière, elle est traversée par la lumière. Les théories physiques actuelles ne définissent donc qu’une toute petite partie de notre univers. Nous sommes constitués d’un monde d’atomes qui baignent dans une structure totalement inconnue pour le moment. Ainsi, nous ignorons pour l’essentiel la nature de notre univers. Une découverte telle que celle-ci montre la dimension de notre inconnaissance dans ce domaine.
La « matière-noire » est le catalyseur des structures de notre univers. Cette « matière-noire » est le creuset des étoiles qui elles-mêmes ont forgé les atomes de notre univers dont nous sommes tous constitués. La « matière-noire » traverse sans encombre toute structure de matière atomique.
Il y a un rapport direct entre le monde des particules et celui de la cosmologie.
Si l’on sait ce que l’on cherche et qu’on le trouve, l’on apprend pas grand chose. Par contre, trouver ce que l’on attend pas, ouvre des horizons. « L’énergie-noire » est une force qui régit les ¾ de l’univers, cet univers qui accélère son expansion.
« L’énergie-noire » est une propriété de l’espace et une force de répulsion qui s’oppose à la gravité. Si « l’énergie-noire » disperse, la « matière-noire », elle, contracte et conserve.
Atome = 5%
Matière-Noire = 23%
Energie-Noire = 72%
Nous naviguons sur l’écume du monde !
IV
La mécanique Quantique
Changeons de point de vue. Plaçons-nous au niveau de l’infiniment petit, dans la dimension des atomes et des particules.
Ce monde est régit par des lois radicalement différentes de celles qui régissent notre quotidien. Dans l’univers quantique les choses ne restent pas à un seul et même endroit ou ne suivent pas une seule direction. Une chose est en une multiplicité d’endroits en même temps !
L’électron porte en lui une multitude de possibilités. Toute la matière qui constitue notre univers est faite d’atomes et de particules sub-atomiques (les quarks) gouvernés par la probabilité aléatoire et non par la certitude. La nature des choses est intrinsèquement probabilité. Tant qu’une particule n’est pas mesurée, ses caractéristiques sont incertaines. C’est l’acte « mesurant » et « identifiant » qui force la particule à faire un choix et se définir !
La « réalité » toute relative de l’univers dépend-elle du fait que quelqu’un l’observe ?
Si l’on mesure une particule « intriquée », elle est affectée par cette mesure. Non seulement elle est elle-même affectée, mais tout ce qui est « intriqué » avec elle l’est également, et ce quelque soit la distance.
L’aléatoire du monde quantique semble cependant s’effacer à mesure de l’augmentation en taille des choses. Dans ce monde quantique chaque possibilité pourrait trouver son aboutissement, alors qu’au niveau des objets, il n’en reste qu’une.
Il se peut donc que cette réalité-là dépasse le cadre de l’univers que nous « voyons », créant des « mondes nouveaux » dans des univers latéraux où chaque possibilité peut se réaliser, ce qui donne un peu le vertige !
Il n’y a pas de frontière entre l’infiniment petit et l’infiniment grand.
V
Univers et Multivers
(unicité dans l’Univers et multiplicité dans les Multivers)
Le « big-bang » est/et gravité-répulsive donnent L’INFLATION. De cette « inflation » originelle demeure l’ultime vestige du fond-diffus cosmologique, laissé par le big-bang lui même. L’espace garde une densité d’énergie énorme dans les Multivers.
Actuellement, le Multivers semble rester une incertitude non-vérifiable. Existe-t-il ? N’existe-t-il pas ? Impasse ?
Une issue pourrait cependant se présenter au regard de la « théorie des cordes » et de « l’énergie-noire » :
La théorie des cordes donne une explication de l’univers à l’échelle du microcosme.
L’énergie-noire donne, elle, une explication basée sur l’expansion-accélérante du cosmos.
Ces deux disciplines vont ainsi lever le voile.
Le « vide » contient de l’énergie. La mécanique quantique démontre l’importance considérable de cette énergie au niveau du microcosme :
Les atomes produisent les particules que sont les protons et les neutrons, qui produisent eux-mêmes les « quarcks », particules sub-atomiques, et in-fine l’énergie vibratoire des « cordes ». Toute chose est constituée de cet élément fondamental unique.
Les « cordes » développent de multiples propriétés selon leurs vibrations, de nombreux types de particules, qui permettent l’existence de neuf dimensions. Six d’entre elles sont trop petites pour être appréhendées. Pourtant, les formes de ces dimensions influent sur les trois que nous connaissons de façon familière. C’est une sorte d’ADN de notre univers.
Dans chacun des univers possibles tout se détermine sur les différences de nature de « l’énergie-noire »…
Albert Einstein :
Un être humain fait partie d’un tout qu’on appelle « l’univers » ; c’est un élément limité dans le temps et l’espace. L’être se ressent, avec ses pensées et ses sentiments, comme séparé du reste – une sorte d’illusion d’optique de sa conscience. Cette illusion est comme une prison qui nous confine à nos désirs personnels et à notre affection pour quelques personnes proches de nous.
Notre devoir est de nous libérer de cette prison en élargissant le champ de notre compréhension et de notre compassion pour embrasser toutes les créatures vivantes, la totalité de la nature dans sa beauté.
« Périls et promesses de la vie spirituelle », p. 507, Jack Kornfield, © édition Pocket oct. 2003
Thich Nhat Hanh nous fait part en écho de sa perception à ce sujet :
— « … si vous observez profondément une vague, vous verrez que la vague ne provient pas de rien. Rien ne vient de rien. Avant d’être là, l’arbre était ailleurs. Il était une graine, et avant cela il faisait partie d’un autre arbre. Avant de tomber, la pluie était un nuage. La pluie ne naît pas, elle est une transformation du nuage. C’est une continuation. Si vous regardez la pluie profondément, vous y reconnaîtrez le nuage qui est la vie antérieure de la pluie.
…
quand je touche un arbre, quand je regarde un oiseau, quand je contemple l’eau dans la crique, je les admire non pas parce qu’ils ont été « créés par Dieu » ou qu’ils ont « la nature de Bouddha », je les admire parce qu’ils sont des arbres, des rochers, de l’eau. Je m’incline devant un rocher parce qu’il est un rocher. Je ne m’incline pas devant un rocher parce qu’il serait habité par un esprit, pas plus que je ne considère le rocher comme un être inanimé. Car pour moi, le rocher n’est rien d’autre que la conscience, l’esprit lui-même.
…
La vague qui regarde profondément en elle s’aperçoit qu’elle est faite de toutes les autres vagues, si bien qu’elle ne se sent plus coupée du reste du monde. Elle sait reconnaître que les autres vagues sont aussi « chez elle ». Quand vous pratiquez la marche méditative, marchez de manière à reconnaître votre demeure, ici et maintenant. Voyez les arbres comme votre demeure, l’air comme votre demeure, le ciel bleu comme votre demeure et la terre sur laquelle vous marchez comme votre demeure.
…
Le cosmos est notre demeure et nous pouvons toucher le fait d’être conscients de notre corps. »
(« BOUDDHA et JÉSUS sont des frères », p. 22, 26, 34 et 37, Éditions Le Relié © mai 2001)