L’Administration préconise, pour les habitants des grandes villes, le détachement. C’est, nous dit-on, le seul moyen qui nous reste de remédier à la crise économique, au déséquilibre spirituel et aux embarras de l’existence. (34)
Moins abordables que Rhinocéros, ces Victimes du devoir créent le malaise. Le glissement d’une situation anodine vers la brutalité, la torture, le viol de l’intimité, la négation de l’intégrité. La trahison de Madeleine. Autant de coups qui s’abattent sur Choubert, entraîné dans une transe chamanique malgré lui. La lectrice, ne sachant plus à quel sentiment se vouer, a froid dans le dos. Se raccroche à son imagination pour mettre en scène mentalement le ballet des cinq personnages.
LE POLICIER – Je vous l’ai dit. Il est lourd quand il doit être léger, trop léger quand il doit être lourd, il est déséquilibré, il n’adhère pas à la réalité ! (85)
Dans l’édition Folio théâtre, l’introduction de Gilles Ernst est éclairante, complète, reprend tous les éléments contenus dans la pièce, les met en relation avec la vie et la démarche d’Eugène Ionesco. Il est prudent de s’y référer pour ne pas rester sur une vague nausée après lecture, ça remet les idées en place.