Jim Harrison, En marge

Jim Harrison, En marge

Je reconnaissais à contrecœur l’existence d’un monde extérieur à  mon cerveau. (189)

J’ai trouvé un ami littéraire. Bourrin, Hâbleur, doté d’un caractère problématique, mais un ami tout de même.

Là, je me dépouille de mes systèmes de survie. (9)

Dès la préface, mes vibrisses ont frétillé. Cet homme profondément vivant ne me ressemble guère dans ses aspects extérieurs, mais son sens de l’autodérision, sa pratique de la lucidité, sa recherche de mise en abîme et ses déboires avec son cerveau me le rendent proche.

Je suis depuis longtemps un disciple absurdement inepte du zen. (287)

Ses histoires ont un côté décousu. La concordance des temps est bousculée. Il ne fait pas beaucoup d’efforts de transitions. Il faut écarter les broussailles pour découvrir le fourré où se terre l’animal. Je ne le suis pas toujours, mais j’aime bien ne pas tout comprendre. Cela donne des projets d’avenir.

Ce que nous ne comprenons pas est toujours plus intéressant que le reste. (86)

Ses considérations littéraires sont parfois délicieuses :

Pour me taquiner, il a ajouté le nom d’Hemingway, en sachant très bien que je n’aimais pas beaucoup cet auteur qui moi évoquait un gros poêle à bois incapable de diffuser beaucoup de chaleur. (61)

Il n’existe pas d’auteurs dans l’histoire de la littérature occidentale qui abrase les terminaisons nerveuses aussi efficacement, qui explose les neurones aussi violemment, que Dostoïevski. (181)

La structure du livre est originale : biographie – 7 obsessions – biographie. Ce qui fait avancer le moteur est au cœur de la vie… Cet homme des bois et des rivières en est arrivé à la même conclusion que moi : le temps – celui que nous choisissons d’utiliser comme bon nous semble – est notre bien le plus précieux, le garant de notre équilibre mental et de notre intégrité.

En fait, ce chaos est bel et bien votre vie, dans lequel vous essayez de créer une ligne narratrice perceptible. Depuis l’enfance, j’aime observer les oiseaux et, lorsque je suis enfoui dans mon chaos personnel, je m’imagine en oiseau doté d’une grande intelligence humaine, doté de la capacité de voir la vie de manière topographique et de voir le temps de manière holographique. (318)

 

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Claire Keegan, Les trois lumières

Lac du Salagou

Je suis dans une situation où je ne peux ni être ce que je suis toujours ni devenir ce que je pourrais être. (17)

Sensation oh combien connue et déstabilisante ! Le temps mort de l’adaptation…

Claire Keegan est toujours aussi habile pour mettre des mots sur les situations vécues, rendre compte des perceptions dans une situation donnée. Il y a quelque chose du zen dans cette confrontation directe avec la réalité. On se retrouve dans le regard de cette petite fille comme si elle nous parlait de nos propres souvenirs- au-delà des situations qui ne sont pas similaires. C’est un processus apaisant qui exorcise le sentiment d’étrangeté ou la sensation de ne pas être normale, pas comme les autres. Claire Keegan nous renvoie à l’universalité des perceptions dans le grand silence irrégulier.

Lac du Salagou

Traquet motteux

Pygargue

Pygargue

Ragondin

Cisticole des joncs

 

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Jean Carrière, Le prix d’un Goncourt

Massif de l’Aigoual – Faubel

Récit autobiographique, comme Le nez dans l’herbe, qui l’a précédé, Le prix d’un Goncourt est beaucoup plus douloureux. Le ton est plus réaliste, plus proche du récit. Plus intimiste aussi.

Jean Carrière reprend beaucoup d’éléments déjà abordés mais en les approfondissant. Sur son enfance, notamment. Il raconte en détail le passage, à l’âge de 8 ans, de l’état de larve musicienne à celui de papillon ivre de vent, de terre et d’herbe. Puis le basculement, 10 ans plus tard, la perte du lien vivant avec la réalité, la plongée dans l’angoisse, la décomposition des sens qui rend le présent inhabitable.

C’est cette faille entre un présent désert et un passé luxuriant qui l’amènera à l’écriture.

La réception du Prix Goncourt ne fera qu’aggraver cet état. Le petit monde parisien de ceux qui s’imaginent avoir sucé la Tour Eiffel pour la rendre pointue [Jean Giono] et les attentes des lecteurs mèneront Jean Carrière vers la panne, l’état de légume, l’infirmité mentale qui me fourrait sous les couvertures.

Il n’y avait plus ni haut ni bas, ni envers ni endroit, ni dedans ni dehors. (987)

Il connaîtra une résurrection en 1984, grâce à l’arrivée sur le marché d’une nouvelle molécule qui jugule ses états maniaco-dépressifs. L’Aigoual lui tend alors les bras.

En somme j’étais devenu un homme à peu près normal, c’est-à-dire capable de s’utiliser sans brûler vif. (999)

Un témoignage déchirant où l’auteur se met à nu.

Je finis par douter du principe selon lequel être c’est savoir qu’on est : je n’ai jamais connu de vie si profonde qu’à cette époque où je n’existais qu’à travers la présence légère des choses – des parfums et des sons qui tournent dans l’air du soir. (899)

Le symbole peut sembler assez simpliste, mais il me permet de schématiser la situation d’équilibriste qui a toujours été la mienne. L’écriture s’alimente dans ce grenier empli de fantasmes; à chaque fantasme auquel la mémoire est soumise correspond un démon qui ne dort que d’un œil et que réveille la moindre manipulation des souvenirs. L’écriture n’a jamais guéri personne ni soulagé l’écrivain que tourmentent sans trêve les questions insolubles. (931)

Faubel

Faubel

Chocard à bec jaune

Massif de l’Aigoual

Érèse coccinelle

Faubel

Faubel

Massif de l’Aigoual

Éphippigère

Faubel

Traquet motteux

 

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Jean Carrière, Le nez dans l’herbe

Gorges du Trèvezel – Grotte de St Firmin

Il est émouvant de découvrir un livre d’entretiens (arrangés, réécrits) de cet écrivain que j’imaginais farouche. Jean Carrière s’y livre avec franchise et dévoile des larges parts de son intimité.

Il revient sur son enfance marquée par la musique, qui ouvrit très tôt chez lui de vastes espaces intérieurs. Ils lui insufflent la vocation d’écrire et de courir les collines à la recherche d’autre chose.

J’avais pris la mesure de ma vraie vie. (708)

Un goût effronté et total de l’existence en soi.

L’homme des bois questionne la vie dans son essence, cherche le lien entre l’homme et l’insaisissable, le point de non-départ. Il y a une grande cohérence entre son être et ses écrits. L’homme est intègre, a toujours évolué en dehors des carcans. Il a porté sa sensibilité à fleur de peau dans le monde avec douleur et flamboyance. Et ce n’est pas une mince affaire que de porter son intégrité à bout de bras dans un monde qui ne valorise guère ce genre de démarche. Comment naviguer entre naissance et mort tout en restant un être humain à part entière ?

C’est précisément à partir de la mort que tout reste à dire sur la vie. (857)

J’ai retrouvé la trace des romans que j’ai aimés : la combe, la caverne sont évoqués. Il vaut mieux avoir lu Retour à Uzès et L’épervier de Maheux pour vraiment apprécier l’entièreté de l’ouvrage. Sa démarche d’écrivain se dévoile. La naissance d’une métaphysique des grands espaces. Il a finit par donner naissance à une littérature qui reflète la réalité extérieure à l’homme, les pierres, le vent, cette matière qu’il respectait tant chez Jean Giono.

Dense, riche, un concentré de force.

Le roman est là pour prendre le relais, et fournir à notre état civil les violences, les péripéties, les démesures qui lui conviennent et qui sont finalement les siennes, mais irréalisées, à l’état d’ébauche. En transposant nos balbutiements dans le définitif, l’achevé, la réalisé, le roman donne à notre destin les dimensions et la densité que la vie lui refuse, et il devient un acte de notre vie, il s’incorpore à notre vie, il ne nous délivre de rien, il nous prend en charge là où nous ne sommes plus capables de le faire nous-mêmes. (765)

Cette ascèse de la création consiste en effet à moins dévorer le monde qu’à l’adorer. A en jouir au second degré. L’expérience de l’écriture montre à quel point une certaine satiété, ou satisfaction immédiate des besoins, peut être néfaste à ce don merveilleux de pouvoir parler des choses tout en y renonçant, et peut-être grâce à ce renoncement. Il est également vrai que l’artiste parle encore mieux de ce qui lui manque que de ce qu’il possède. (800)

Gorges du Trèvezel

Vautour fauve

Vautour fauve

Grotte de St Firmin

Grotte de St Firmin

Grotte de St Firmin

Grotte de St Firmin

Grotte de St Firmin

Grotte de St Firmin

Céphalenthère à longues feuilles

 

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Léon Tolstoï, Maître et serviteur, lu par Claude Lesko

Léon Tolstoï, Maître et serviteur, lu par Claude Lesko

Ce texte est du même acabit que Boule de Suif de Guy de Maupassant. Ce sont tous deux des petits bijoux d’écriture. Pas un mot de trop, personnages et récit précisément dosés, une merveille d’équilibre, un cadrage photographique. Léon Tolstoï a réussi à concocter un texte littérairement fin et soigné, offrant de multiples niveaux de lecture, avec des personnages épais et rugueux.

Le maître est irresponsable, condescendant envers son serviteur, inconscient des réalités. Il réprouvait toujours, d’ailleurs, l’ignorance et la bêtise des paysans. Leur errance dans le vent et la neige frise la fantasmagorie. Ils tournent en rond en un cercle glaçant, cernés de menaces de plus en plus palpables. Les refuges chauds et rassurants, par deux fois proposés, par deux fois refusés, ajoutent du contraste et du tragique à cet entêtement absurde.

Claude Lesko a une voix douce, posée et paisible qui s’enfonce dans la neige en compagnie des personnages. Sa lecture enrichit l’ambiance pour un chemin vers le dépouillement où l’homme se retrouve face à lui-même en-dehors de tout secours. Christique et magnifique.

 

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Daniel Odier, Tantra

Daniel Odier, Tantra

Daniel Odier nous offre ici une présentation claire et sans ambigüités du tantrisme shivaïte. Il déblaie les idées fausses sur l’éveil – Chercher un état stable, c’est se couper du réel (74) – et fait le récit de sa relation intense avec Devi.

Cette histoire véhicule un charme vivifiant, intriguant, émouvant. Reflet d’un monde spécifique, d’une culture indienne qui au-delà des apparences touche à l’humain dans son essence. Daniel Odier plonge dans le réel de tout son corps, ose le réel, sort de l’état d’homme social le diaphragme souple comme un méduse.

J’avais la sensation d’être un feuillage léger à travers lequel passait la réalité. (207)

Beaucoup de justesse, chacun y trouvera du grain à moudre selon son expérience. Témoignage plein de fraîcheur d’une relation qui à la fois fait naître des résonances et nous échappe, nous rappelle qu’une spiritualité bien vécue ne rejette rien mais accueille toute la palette de l’expérience quotidienne dans son sein.

Les crises mystiques de l’adolescence, la révolte magnifique qui nous fait douter de la voie tracée par d’autres, un jour, nous nous en éloignons et décidons de payer une dette imaginaire à la société, nous acceptons de mourir à nous-mêmes. Et la plus grande supercherie c’est que de cette mort-là, personne ne s’inquiète. Au contraire, on la guette, on l’accueille, on la récompense. (73)

 

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Jean Carrière, Un jardin pour l’éternel

Toulouse, Grand Rond - Jean Carrière, Un jardin pour l’éternel

Toulouse, Grand Rond

Il était toujours prêt à voir un signe du ciel.

On ne sait pas si Pierre-Ézechiel est inspiré ou halluciné. Folie et ouverture spirituelle. Perte des limites habituelles, des repères sociaux. Tout entier habité de lumière, de joie et d’émerveillement. Tout entier aussi habité d’effort, de patience, de persévérance et de solitude. A tel point que la compagnie des hommes lui est une perte de temps.

On retrouve Abel Reilhan, son entêtement, son impuissance. On retrouve le Père Reilhan et ses pas dans le ciel quand il laboure les champs hauts. L’intrication mystique de la nature et des élans de l’homme est une fois de plus au cœur des interrogations de Jean Carrière.

J’ai été, comme lors de ma lecture de L’épervier de Maheux, soufflée par la puissance d’écriture de cet écrivain. Elle véhicule une dimension intérieure qui me parle au fond des tripes.

Cette transformation de la réalité par ses sens comblait en lui des vides dont il n’avait jamais soupçonné l’existence. (34)

Notre grande erreur à tous est de croire que l’homme a quelque-chose à faire ici-bas. [Mgr Darboy] (231)

 

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Jean Carrière, L’épervier de Maheux

Plateau du Lévézou, chemin des éoliennes - Jean Carrière, L’épervier de Maheux

Plateau du Lévézou

Il faut s’accrocher pour démarrer. Les phrases ne sont pas simples. Jean Carrière nous offre une langue râpeuse, rude et tellurique, toute de cailloux et de douleurs. Le pays est lourd, âpre, peu enclin à la présence humaine. C’est un endroit où il n’est pas de maîtresse branche ni de poutre à portée de main qui n’aient offert au moins une fois la tentation d’y accrocher un bien vilaine corde. Une peinture du pays cévenol qui sort des sentiers touristiques.

Le vieux Reilhan, taiseux lunaire, trouve sa consolation dans la navigation à travers les grands espaces avec enfin le ciel immense pour lui seul » quand il peut emprunter un cheval pour labourer ses champs hauts. Samuel, le benjamin, cultive son handicap par mollesse et se débat avec une mère omniprésente. Abel, l’aîné, est un ours des montagnes buté. Il s’acharne à tirer avec un mauvais fusil sur une cible inaccessible. Les personnages secondaires ont autant de densité que les personnages principaux. Ils marquent, frappent l’imagination de leur réalité.

Le médecin, surtout, personnage cynique, cultivé, au regard distancié, parsème le roman de ses commentaires, témoin désabusé mais aimant à sa façon. L’irréalité des apparences matérielles face à la vie de l’esprit, la valeur dérisoire de l’être humain écrasé par les parois de la montagne, la superficialité de la vie courante, l’habitent à le hanter.

Il vaudrait mieux être une pierre que ce nous sommes. (315)

Un de ces bouleversements littéraires qui remuent l’intérieur comme il en arrive rarement. J’ai été soufflée.

Prenons un exemple : un beau matin, des messieurs très calés décident qu’il faut soigner les crétins du Haut-Pays (tenus pour tels) : ces énergumènes baveurs et ravis qu’on rencontre parfois là-haut assis au pied d’un arbre, et qui ont avec les papillons ou le vent de mystérieux conciliabules, les empêchent de dormir. Soigner, c’est- à-dire essayer d’ajuster le comportement d’un zèbre qui vit au milieu de ses chèvres dans un isolement presque total, sur celui du premier couillon venu, et d’ailleurs parfaitement abruti par les cohues, le tiercé, les bistrots ou le cinéma. On voit qu’il ne s’agit pas du même animal. Guéris, c’est-à -dire bons pour l’abrutissement général, on les renvoie chez eux. (22)

Le monde autour de lui continuait à vivre sur sa lancée personnelle qui n’était pas celle des hommes, insoucieuse et sans projet, tout entière dans la gloire d’un instant de création qui durait depuis quelques milliards d’années. (296)

 

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Maurice Genevoix, Raboliot

Maurice Genevoix, Raboliot

Devant une telle écriture, je suis restée scotchée. Je ne m’y attendais pas. Elle m’est tombée dessus comme un paquet de neige glissant d’un arbre. Non seulement Maurice Genevoix utilise du patois, bouscule les genres, mais il s’amuse aussi avec la langue et invente le terme qui lui manque : une fourrure peladeuse, des tanches dégouttelantes, les doigts entrefermés. Pas une page de tournée sans ouvrir le dictionnaire.

Habité, physique, nourri d’humus et de brumes matinales, c’est un roman incarné, solide. Les personnages ont du coffre, de la consistance, des bras, des jambes, des trognes. Raboliot est un animal des bois, instinctif, les moustaches frémissantes, jouissant de la liberté qu’offrent les taillis, écoutant les bois respirer comme ils respirent quand les hommes n’y sont pas. Les descriptions sont superbes, évocatrices, pointant les détails qui mettent tout de suite le paysage en place, rappelant ce que nos sens ont perçu dans des circonstances similaires. Le brouillard, les mottes de terre spongieuses, l’élasticité des ronces habitent notre perception du monde et débordent sur l’imagination. Ce roman respire toute la force d’âme de l’auteur. Dignité et intégrité y sont défendus avec noblesse.

Un véritable éblouissement.

Un putois a beau être fin, il n’est pas libre de ne pas puer. (23)

 

 

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André Dhôtel, Le pays où l’on arrive jamais

Causse du Larzac, lac des Rives

Le pays où l’on arrive jamais fait partie de ces romans soit disant pour enfants tellement croisés sur les rayonnages, chez les amis, dans la famille, qu’ils me sont devenus familiers sans que je puisse me rappeler vraiment si je les ai ou ne les ai pas lu. Le souvenir d’une antique déception me semble associé à celui-ci. Rouvert à la faveur de l’été, il m’a enchantée.

Le tout début est délicieux. Le rapport de mépris institué entre la bonne société et les forains incontrôlables est finement décrit.

La langue est belle, le récit construit. André Dhôtel ne cherche pas à en faire trop. Il affectionne les broussailles, les murs à franchir en secret. Il cultive le temps qui passe autant que les péripéties. Gaspard, Théodule, Hélène bataillent pour préserver leur intégrité malgré ceux qui font obstacles à leurs aspirations (souvent avec les meilleurs intentions). Le livre finit sur une ode à la vie et à une certaine idée de la liberté, n’en déplaise à ceux qui déplorent l’originalité du monde.

Je comprends finalement pourquoi je n’ai pas pu aimer ce livre quand j’avais une dizaine d’années. Ce parfum d’enfance qui émeut l’adulte ne touche pas l’enfant. Il faut avoir vécu pour apprécier ce roman.

– Tu n’as pas besoin d’avoir confiance en moi, dit Gaspard. Je ne suis bon à rien.
– Personne n’est bon à grand-chose.
(105)

Lac des Rives

Lac des Rives

Lac des Rives

Causse du Larzac

 

 

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