Jean-Luc Fabre, La Vénitienne des pénitents blancs

Jean-Luc Fabre, La Vénitienne des pénitents blancs

Causse Noir, Roquesaltes

J’ai habité longtemps près de la librairie Privat, à Toulouse, et garde à son égard une grande tendresse tant elle est porteuse d’identité régionale et de bravoure face aux aléas. J’étais donc très curieuse de fureter dans leur nouveau champ noir de publication.

Roman historique, cette Vénitienne recèle en elle les plaisirs et les défauts du genre. Si les ingrédients tirés du XVIIIe siècle sont soigneusement choisis et mis en valeur, si l’auteur a travaillé avec un plan de l’époque sous les yeux, il y manque comme en balance un caractère singulier, une recherche en écriture. De qualité très honnête, le livre se parcourre avec plaisir mais sans avoir envie de s’y attarder (surtout au cours des scènes de torture généreusement et abondamment décrites), ni de s’attacher aux personnages. J’ai gardé en permanence une impression de déséquilibre, d’éléments ne s’inscrivant pas dans une globalité visionnée par l’auteur et vécue par le lecteur. Comme ce cadavre qui est d’abord décrit comme une forme plus sombre à moitié recroquevillée, puis sur la même page comme un corps allongé sur le dos. Tout le livre est ainsi. A la fois recroquevillé et allongé sur le dos. Un petit pot façonné alors qu’il n’y a plus ni bois ni eau disponibles. Des émotions excessives autour d’un cadavre retrouvé dans une chapelle alors que les morts sont légion dans la ville et que même la brave cuisinière du botaniste en est rendue à laisser sans émotion les jeunes filles rendre l’âme devant sa porte. Des Vénitiens faisant libre commerce de thériaque à certaines pages, puis accusés d’en voler des pots à d’autres. On peut expliquer, arguer, mais cela n’empêche pas que l’on boîte en permanence dans notre lecture. On est obligé de mettre des cales pour avancer et palier les demi-incohérences. L’intrigue est un gros paquet mal ficelé dont le dénouement n’est cependant pas frustrant.

Je me rappellerai les apothicaires, les ateliers de faïence, le jardin des plantes, ce Montpellier du XVIIIe dont les images ressortiront si le contexte s’y prête. Peu de richesse littéraire, tout est trop plat, étalé comme du beurre sur une tartine, mais une habileté certaine à mettre l’histoire en contexte de manière à ce qu’elle nous marque.

[Lu dans le cadre de ces fabuleuses masses critiques]

Causse Noir - Roquesaltes

Causse Noir – Roquesaltes

Causse Noir - Crave à bec rouge

Causse Noir – Crave à bec rouge

 

Ce contenu a été publié dans Explorations littéraires. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *