Jean Carrière, Les années sauvages

The J. Paul Getty Museum, Los Angeles - Jean Carrière, Les années sauvages

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Et maintenant nous nous aimions comme dans les romans à l’eau de rose ou les contes de fées. (117)

Jean Carrière qui écrit un roman d’amour ? Et oui… avec dépouillement, fragilité, sans masquer sa vulnérabilité. Jean Mouraille est désarmant. Si les romans de Carrière sont pleins de Jean Carrière, passagèrement irritant, même quand on l’aime, par ses éléments autobiographiques récurrents (un père musicien, la nostalgie des premières sensations, la fuite du temps), il y a derrière un travail et une maturation incontestables. Ici, le symbolisme est plus affirmé, plus travaillé. Les obsessions sont exprimées avec plus de lumière, de fluidité et de beauté que dans ses romans précédents. Cette île heureuse perdue au large des forêts, ce refuge sauvage, rappelle furieusement la caverne des pestiférés, mais sur un mode totalement renouvelé.

La terre avait brûlé et rien n’y repousserait plus, nous étions tous condamnés à un exil futur où les printemps ne fleuriraient plus avec leur naïveté d’autrefois. (163)

En ces temps où l’on assassine les trublions du rire, cette phrase a des résonances profondes. Jean Carrière questionne sans fin notre désastre d’exister, les instants de grâce et leur précarité, le fait d’être vivant. Sa lucidité, ses errements, sa férocité douloureuse, lâchent un peu de terrain devant l’amour, puis reviennent, toujours taraudant. Par sa flamboyante souffrance d’être au monde, Jean Carrière me guérit de tout…

 

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